Date de publication
6 octobre 2023
modifié le

"50 ans se sont écoulés depuis le coup d’État au Chili, mais la tension politique est toujours là"

Rencontre avec le professeur Eduardo Gallegos Krause, de l’Universidad de la Frontera au Chili. Accueilli à Rennes 2 dans le cadre du programme de Chaire Internationale en Sciences Humaines et Sociales, il participe au colloque de recherche "Chili, 50 ans, 1973-2023. Des changements ? / Chile 50 años, 1973-2023 ¿Qué cambió?” organisé les 11 et 12 octobre 2023.

Le professeur Eduardo Gallegos Krause, Universidad de la Frontera, Chili

Le professeur Eduardo Gallegos Krause est spécialiste des théories de la communication, de la théorie du discours, de la sémiotique et  des perspectives critiques sur les médias à la Faculté de l'Éducation, des Sciences Sociales et des Sciences Humaines de l'Université de La Frontera (UFRO), Temuco, Chili.

Comment la collaboration avec ERIMIT a-t-elle commencé et avec qui travaillez-vous principalement ?

Je travaille beaucoup avec Jimena Obregón Iturra (ancienne directrice du Master Amériques) et Andrés Castro Roldán, (co-directeur du Master des Amériques). J’ai rencontré la professeure Jimena Obregón Iturra en 2009, quand j'étais étudiant en master à Sciences Po Rennes. Ensuite, j'ai fait un master et un doctorat en communication au Chili. Dans le cadre de ce doctorat, j'ai fait deux stages de recherche, l'un aux Pays-Bas, l'autre ici, à Rennes 2. Je suis donc resté en contact avec elle pendant toutes mes études. C’est sur son invitation que je suis ici actuellement, dans le cadre de la chaire internationale.

 

Que pouvez-vous nous dire sur vos recherches et sur le sujet que vous traiterez lors du colloque “Chili, 50 ans, 1973-2023. Des changements ?” ?

Mes recherches portent sur la médiatisation des identités et des altérités dans une perspective contemporaine. Je m’intéresse particulièrement au traitement médiatique des mouvements sociaux, aux imaginaires autour des identités, et à la relation entre le "nous" et les "autres". Je travaille également beaucoup sur les médiations socio-historiques entre la presse et la littérature au 19e siècle. Pendant le colloque international “Chili, 50 ans, 1973-2023. Des changements ?”, je vais parler de la continuité des imaginaires de l'anticommunisme au Chili. 50 ans se sont écoulés depuis le coup d’État, mais la tension politique est toujours là. Il y a toujours un imaginaire qui regarde les adversaires politiques comme des ennemis. Cette diabolisation est très liée aux sentiments de vivre avec des ‘fantômes communistes’. De nombreux autres sujets en lien avec cette question seront également examinés pendant le colloque. Les interventions s’intéresseront par exemple aux mouvements sociaux, aux questions des mémoires, ou encore aux arts et au cinéma au Chili.

 

Pourriez-vous nous en dire plus sur les changements que vous avez mentionnés, en ce qui concerne la politique au Chili ?

 Y a-t-il eu de réels changements au cours des 50 dernières années ? Je ne suis pas très optimiste. Au contraire, j’observe une continuité… Le sentiment anticommuniste de 1973 n’a pas changé. Il s’agit d’un héritage de l'extrême-droite, de la peur d'autrui, autrui étant les communistes. À travers l’étude que j’ai conduite, j'ai constaté que  l'anti-communisme est toujours aussi présent dans les processus actuels qu’en 1973. Cela transparaît dans le traitement médiatique au Chili, dans les commentaires des blogs, des lecteurs… Le clivage politique est très important aujourd’hui, les divisions sont très fortes. Je parlais avec des personnes qui ont vécu le coup d'État et beaucoup m’ont dit que le climat actuel faisait écho à « des choses déjà vécues ». La situation au Chili est à l’image de ce qui se passe ailleurs en Amérique latine et aux États-Unis avec Jair Bolsonaro au Brésil, Donald Trump aux États-Unis, Javier Milei en Argentine. Il s’opère un virage à l'extrême-droite qui est très problématique.

 

Quelles autres activités avez-vous prévues à Rennes 2 dans le cadre de votre visite ?

Je vais donner deux master class pour le Master des Amériques. Je parlerai du mouvement mapuche au Chili, et aussi de la stratégie de visibilisation dans la presse mainstream, dans la presse alternative, et des liens entre les poètes mapuches et la presse. Nous ferons de l’analyse des discours, des entretiens dans la presse avec des poètes mapuches. Les cours se dérouleront le 18 et 19 octobre, en espagnol.

 

 

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