Date de publication
30 janvier 2023
modifié le

Théo Arnaud, psychologue : « La rencontre des patient·e·s est d’une grande richesse »

Rennes 2 part à la rencontre de ses ancien·ne·s étudiant·e·s. Théo Arnaud, 25 ans, est aujourd’hui psychologue spécialiste des troubles neurodéveloppementaux au sein du service de pédopsychiatrie du centre hospitalier Guillaume Régnier.

Quand êtes-vous entré à Rennes 2 et pour y suivre quelles études ?

Après une licence de psychologie à Montpellier 3, je suis arrivé à Rennes 2 en 2019 en master Psychologie clinique, psychopathologie et psychologie de la santé parcours Handicap et troubles neurodéveloppementaux. Il existe de nombreuses spécialités différentes selon les champs théoriques de la psychologie et en fonction des universités, et cette filière était mon choix numéro 1.

Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire ces études ?

Le contact humain initialement. J’étais désireux de pouvoir aider les autres et particulièrement les enfants, donc j’ai choisi une spécialité qui touche davantage ce public. L’aspect très scientifique me correspondait aussi : en neurosciences, on s’intéresse au fonctionnement du cerveau et du système nerveux, à l’impact de certains médicaments ou pathologies, aux tests psychologiques et à la manière de les interpréter. Dès la licence, on a d’ailleurs des cours de biologie, de statistiques, etc. Plus on avance dans la formation et plus la dimension scientifique est prégnante.

Quels sont globalement vos souvenirs de la formation : les cours, l’ambiance, l’organisation de travail ?

Les conditions en master étaient un peu particulières en raison du Covid-19. Mais j’ai fait mon premier semestre à Villejean en présentiel, dans une ambiance plutôt chaleureuse et conviviale, sur un campus accueillant - même si j’ai le souvenir d’avoir dû me dépêcher d’aller à La Harpe suite à des changements de salle de dernière minute [rires]. On a commencé par deux jours de formation aux premiers secours, ça nous a permis de créer rapidement du lien entre étudiant·e·s et j’en garde un bon souvenir en termes de cohésion de notre promotion.

Concernant l’organisation de travail, il s’agit principalement en master de dossiers à faire seul·e ou en binôme ; même si on s’organise comme on le souhaite, cela demande de nombreuses lectures et recherches bibliographiques et un important travail de rédaction. Il y a également quelques examens oraux où l’on présente des situations cliniques ou des exposés sur divers sujets. Surtout, 200 heures de stage en M1 et 500 heures en M2 sont obligatoires pour valider le diplôme. Je conseille de commencer les recherches le plus tôt possible, car même si le stage peut s’effectuer dans une grande variété de structures, les demandes sont beaucoup plus nombreuses que les places, d’autant plus qu’il est conseillé d’en faire en licence - j’ai par exemple trouvé mon stage de M2 sept mois à l’avance… J’ai fait mon stage de M1 à Redon dans un ESAT (établissement et service d'aide par le travail) accueillant des travailleur·se·s en situation de handicap, et celui de M2 au centre hospitalier Guillaume Régnier, au sein des services de pédopsychiatrie et de psychiatrie adulte.

Qu’avez-vous fait après l’obtention de votre diplôme ?

J’ai été diplômé le 20 mai, et dès le 25 mai je commençais en remplacement d’un congé maternité d’une psychologue du service de pédopsychiatrie de Guillaume Régnier. Puis j’ai obtenu un poste pérenne que j’occupe actuellement, au centre médico-psychologique (CMP) de Bruz de Guillaume Régnier.

Portrait de Théo Arnaud devant le bâtiment S

En quoi consiste votre métier ?

J’ai plusieurs missions. J’accueille des enfants entre 4 et 16 ans (environ 30 patient·e·s par semaine) qui présentent des profils très différents, avec des troubles du développement (trouble de l’attention, du spectre de l’autisme, etc.), et je propose des accompagnements individuels ou en groupe. Je fais aussi des évaluations, durant lesquelles j’utilise des outils de tests pour mesurer des fonctions comme la mémoire, l’intelligence, l’attention, etc. L’objectif de ces bilans étant de permettre l’accompagnement le plus ajusté aux besoins des enfants. J’ai également un rôle de participation à l’élaboration de projets de soins en équipe. Il s’agit d’un travail pluridisciplinaire, par exemple dans mon équipe nous sommes trois psychologues avec des spécialités différentes, une psychomotricienne, une infirmière et deux médecins psychiatres. Lors de réunions hebdomadaires, nous échangeons donc sur les situations, partageons nos avis, etc. Il y a également des réunions plus générales comme le Collège des psychologues où l’on se réunit pour mener ensemble des réflexions générales et institutionnelles sur la place du psychologue au sein de l’hôpital, l’accueil des stagiaires, les activités de recherche, etc. Ce dont on n’a pas forcément conscience lorsqu’on commence les études, c’est du temps très important consacré à la rédaction : les préparations de séances et surtout les bilans demandent entre 5 et 10 heures de rédaction. Je passe aussi beaucoup de temps au téléphone avec différents partenaires, tout un réseau de transmission d’informations autour de l’enfant (la famille, l’école, les médecins…).

À l’hôpital, nous avons un temps spécifique (une demi-journée par semaine) appelé « formation, information, recherche », dédié à plusieurs missions :  mener des recherches pour élaborer de nouveaux outils ou mesurer l’efficacité de certaines prises en charge, accueillir des stagiaires, donner des formations aux équipes ou se former soi-même. Dans ce cadre, je commence une thèse de doctorat à Rennes 2 au sein du laboratoire de recherche LP3C, portant sur la construction d’un jeu thérapeutique pour accompagner les enfants qui présentent un trouble de l’ordre de la schizophrénie.

Que préférez-vous dans votre métier ?

Avant tout la rencontre des patient·e·s qui est d’une grande richesse. Les situations ne sont pas toujours faciles, certaines sont difficiles à entendre et à accompagner, mais certains enfants sont très touchants et cela nous arrive d’avoir de vrais fous rires. J’aime également beaucoup tout le versant recherche.

Quel lien faites-vous entre votre formation et votre métier actuel ?

La formation est ajustée aux exigences du terrain et au profil des patient·e·s qu’on rencontre, les connaissances théoriques sont donc réutilisées. En licence, on peut être parfois déconcerté·e par l’enseignement de matières qui ne sont pas en lien direct avec la psychologie. Je pense qu’il ne faut pas les négliger, car par la suite, ce sont des socles de connaissances avec lesquels on fait de nombreux liens sur le terrain, et selon son projet professionnel cela peut s’avérer très important. La sociologie, par exemple, permet de comprendre des dynamiques de groupes au sein desquelles notre patient·e évolue. Plus généralement, les sciences humaines et sociales permettent une ouverture dans l’analyse qu’on fait des situations : par exemple, nous avons eu une patiente d’origine congolaise qui disait voir des fantômes, et à qui un diagnostic de schizophrénie aurait pu être proposé selon des critères de psychologie tels qu’on les apprend. Or quand on s’intéresse à sa culture, on s’aperçoit que les personnes au Congo font leur deuil de cette manière-là, et qu’il n’y avait rien de pathologique.

Je fais le lien aussi avec les expériences de stages durant lesquelles on apprend énormément et qui nous préparent à l’accompagnement. 

Que conseilleriez-vous aux étudiant·e·s qui envisagent de suivre la même formation que vous ?

La psychologie est une discipline très large, donc je conseillerais de beaucoup lire, d’être curieux·se sur les différentes manières dont elle peut s’exercer (structures, publics, etc.) ; et de ne pas hésiter à faire des stages pour peaufiner son projet professionnel car sur le terrain, on peut être surpris·e dans le bon comme dans le mauvais sens.

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