
L’Université Rennes 2, c’est bien plus qu’un lieu d’études. Dans chaque épisode de Plus qu’une fac, un ou une étudiante de Rennes 2 se confie sur ses choix, ses rencontres, ses peurs, ses envies… Sur ce moment de vie crucial où l’on commence à devenir soi-même. Formation, logement, engagement associatif et politique, etc. sont autant de thèmes abordés par le prisme de l’intime.
Dans cet épisode, c'est Jos qui se raconte. À 22 ans en master DIGISPORT, il travaille sur un projet de recherche pour aider des enfants atteints de cancer grâce à un jeu de réalité virtuelle.
[Musique du générique]
Voix off : Rennes 2, c'est bien plus qu'un lieu d'études. C'est un point où convergent plus de vingt mille destins. Un moment unique où l'on fait des choix, des rencontres et des erreurs. Où l'on apprend à être soi. Où l'on s'élance, chacun et chacune à sa façon.
Dans cet épisode, c'est Jos qui se raconte. À 22 ans, il travaille sur un projet de recherche pour aider des enfants atteints de cancer grâce à un jeu de réalité virtuelle. C'est une histoire de sport et d'espoir, tout de suite dans Plus qu'une fac.
[Fin de la musique du générique]
Jos : Moi, je ne me considère pas comme accro au sport, mais c'est clair que le sport, c'est au-delà des bénéfices de santé. Il y a ce côté hyper ludique et amusant. Il n'y a rien qui rapproche plus que le sport, quasiment, je dirais. C'est clair que je pense que je ne pourrais pas me passer du sport sur le long terme. C'est hyper important pour moi.
En ce moment, je suis en train de terminer mon master 2 que je réalise à l'université de Rennes 2, plus précisément à l'EUR DIGISPORT, pour le master Sciences du numérique et sport. On fait partie de la première promo, donc c'est un nouveau master qui a ouvert à Rennes 2 et c'est le seul en France. Et ça m'a permis de pouvoir un petit peu mélanger ces différentes disciplines en ajoutant une composante d'analyse des données, une composante informatique et aussi on fait un peu d'électronique, justement pour une application dans le milieu du sport, que ce soit en sport santé ou en sport performance. Il y a un petit peu ce contraste-là. Des fois, en licence STAPS, on arrive en pensant faire seulement du sport, mais c'est bien plus que ça. Le sport pratique, c'est un tiers à peine de notre cursus et du coup, il y a beaucoup de sciences. Je m'y étais préparé un peu. C'est justement pour ça que je venais un peu aussi dans ce cursus-là. Et après, oui, c'est l'ambiance universitaire qui n'est pas forcément la même qu’au lycée, donc beaucoup plus libre. Même si au lycée, j'étais dans un lycée où il y avait pas mal de liberté. c'est quelque chose que j'ai encore plus retrouvé à la fac, la vie étudiante, la vie sur le campus. C'était aussi hyper intéressant. En fait, c'est un master où il n'y a pas beaucoup de places qui sont offertes. Ça m'a motivé aussi pour ma licence puisque j'étais peut-être un peu démotivé à ce moment-là.
Maintenant, on en parle beaucoup, de la data dans le sport, mais il y a encore 10-15 ans, c'était très peu présent. Il y a un nouveau marché qui s’ouvre, donc ça va être aussi dans ça que peut s'inscrire à ce master-là. Forcément, il y a la possibilité de continuer en recherche derrière. Maintenant, il y a aussi des gens qui vont plus se tourner vers des entreprises, donc ça peut être en cellules sportives, donc pour des clubs ou alors des fois dans des boîtes qui travaillent justement sur des nouvelles solutions innovantes pour apporter au sport. Et il y a les statistiques qui sont de plus en plus expliquées aux spectateurs. Les nombres de tirs, les nombres de passes, si je prends l'exemple du football, mais il y a aussi maintenant un système inertiel à l'intérieur du ballon qui fait qu'on peut voir la vitesse du ballon lors de la frappe, la rotation lors d'une frappe et c'est des informations qui ont pour but de mieux comprendre le sport ou alors de pouvoir aussi donner plus d’informations aux spectateurs.
[Virgule musicale]
Jos : Il y a deux salles qui sont réservées à notre master. La salle où on est le plus, c'est la L263. C'est là où on a tous nos cours, quasiment l'ensemble des cours. Et on a aussi dans cette salle-là une petite salle de pause avec canapé, micro-ondes, etc. Donc là, on a passé pas mal de temps là-dedans. Et oui, à côté, on a cette salle Mussat qui est une salle d'expérimentation, donc ça peut être intéressant pour tout ce qui est mocap [motion capture, NRLR]. Donc c'est la captation de mouvement ou alors pour faire des tests en réalité virtuelle ou pour faire des captations de mouvement, on a besoin d'une salle qui a très peu de rayons infrarouges. C'est donc une salle qui est en souterrain, donc qui est très noire, donc ça fait un peu salle de cinéma. Et il y a des caméras partout, donc ça va être avec ces caméras-là qu'on va pouvoir capter le mouvement. En fait, on rentre au début sur une espèce de mezzanine avec une grande vue sur la salle qui est en souterrain. Du coup, à l'intérieur de cette salle, il y a les plateformes de force au centre qui sont bleues, mais sinon tout est assez noir. La déco est assez minimaliste.
Un des cours que j'ai préféré, c'était ce cours-là de captation de mouvement où on avait des TP, où on pouvait un petit peu s'enregistrer avec différents systèmes de capture. Donc en fait, il y a ce qu'on appelle du coup justement l'optoélectronique, comme je le disais, avec les caméras infrarouges, mais il y a aussi ce qu'on appelle du markerless, un petit peu la nouvelle solution. Donc c'est sans marqueur ou avec en fait le joueur qui est juste filmé. Du coup, il y a cette intelligence artificielle derrière qui va reconstituer le squelette du sportif. Il y a ce côté technique qui est intéressant aussi parce que des fois, la programmation, c'est vraiment un outil qu'on ne pense pas utiliser, notamment dans ce domaine-là, dans le domaine du sport. En fait, il nous sert à comprendre plein de choses. Il y a des choses qu'on voit avec les données quand on a plein de nombres. On ne le voit pas à l'œil nu et les statistiques, ça permet de refaire sortir ça. Donc oui, c'est intéressant.
[Virgule musicale]
Jos : Dans le cadre du master, on a deux stages de recherche qui sont réalisés en master 1 et en master 2. J'avais pu contacter Amélie Rébillard, que j'avais en professeur en licence, s'il y avait la possibilité de réaliser un projet avec la thématique cancer et une nouvelle technologie. Et donc, il y a ce projet-là qui était en train de se monter. En fait, c'était dans un but de pouvoir proposer une activité physique adaptée en réalité virtuelle à des enfants qui sont atteints de cancer. Et donc, en master 1, c'était un stage assez court de deux mois où on a pu essayer de retravailler un peu sur le jeu qui avait déjà été commencé en collaboration avec Central Supélec, l'école d'ingénieurs de Rennes. Après, on avait pu tester ce jeu-là sur des enfants sains au début. Donc, c'était dans un collège où on était allés. Et en master 2, on a essayé de pousser la chose plus loin avec une nouvelle version du jeu qui a été refaite. Et après, on a pu aller tester ce jeu-là pendant deux mois et demi au sein de l'hôpital Sud de Rennes, dans le service oncopédiatrique. Et aussi, le but, c'était que le jeu soit adaptable aux enfants. En fait, c'est des enfants qui subissent de nombreuses contraintes, notamment par leur hospitalisation. Dans le cas des leucémies, notamment, ils peuvent être confinés en chambre stérile. Donc, ils n'ont pas droit de sortir de leur chambre, mais pire, ils n'ont pas droit de s'éloigner trop de leur lit. En fait, il faut qu'ils restent sous un flux d’air pour éviter les agents pathogènes de rentrer. En fait, c'est des enfants qui sont immunodéprimés. il y a ces dispositifs-là qu'ils ont mis en place. Et d'un autre côté, on a aussi des contraintes liées à l'état de forme de l'enfant. Donc, avec des traitements qui sont très lourds, comme des chimiothérapies ou hypnothérapies. Et donc, l'état de forme variable de l'enfant, il est énorme. Et d'un jour à l'autre, tu ne vas pas pouvoir réaliser les mêmes activités physiques que la veille. Et d'un autre côté, on a aussi chez les adolescents qui sont plutôt, ça va être 13-17 ans, il y a des enfants qui sont atteints d'ostéosarcome. Donc, c'est un cas de tumeur solide qui fait que l'enfant peut être amputé. Donc, ici, ça va encore limiter l'accès à l'activité physique pour cet enfant-là. Donc, le jeu devait aussi s'inscrire dans cette objectif-là de pouvoir contourner ces différentes contraintes.
Pour l'instant, il y a un premier jeu qui a été fait. On s'est basé du jeu Beat Saber. C’est un jeu de rythme avec des sabres lasers, donc un bleu en rouge. Des cubes qui défilent très vite à l'écran. Et le but, c'est de couper les cubes dans le sens indiqué par une flèche avec la couleur de sabre correspondante. Après, nous, on a proposé plusieurs options dans ce but-là d'adapter le jeu à l'enfant. il y avait la possibilité de jouer dans plusieurs environnements. Il y avait la possibilité de faire varier la difficulté, donc ça va faire varier la vitesse des défilements des cubes. La possibilité de jouer debout, assis ou à genou sur le lit selon les capacités de l'enfant. Il y a cette possibilité aussi de jouer à l'enfant à une seule main parce que dans certains cas, l'enfant, il peut être perfusé, donc il y a des grosses douleurs à un membre. Du coup, ça va pas être possible de mobiliser les deux bras. Et donc, on a essayé d'ajouter ces différentes options pour, justement, adapter le jeu à l'enfant. Et après, il y a aussi la possibilité d'ajouter des obstacles. Donc, c'est des obstacles à éviter, donc que ce soit s'accroupir ou des fois esquiver sur le côté.
[Virgule musicale]
Jos : Est-ce que je connaissais le cancer avant de réaliser le projet de recherche ? Pas vraiment. J'avais eu des cours par contre en licence qui étaient justement donnés par Amélie Rébillard et où on apprenait comment une tumeur pouvait se développer, son état de métastase. Et voilà, on avait quelques connaissances théoriques qui étaient données en STAPS. Maintenant, les conditions d'hospitalisation, je les connaissais très peu avant d'être dans ce projet de recherche, notamment comment se traitaient ces cancers-là, et spécialement les cancers pédiatriques. La plupart des choses, je les ai apprises après au sein du service où j'ai pu voir comment se passait la vie des enfants à l'hôpital, qui était d'ailleurs plein de vie, contrairement à ce qu'on peut penser. C'est assez intéressant, c'est un service qui dénote un peu des autres avec beaucoup d'animations qui sont proposées aux enfants. Le but, c'est de pouvoir les stimuler, que ce soit sportivement, mentalement, moralement, du coup, avec des clowns qui peuvent venir, des animations, il y a des musiciens, il y a des magiciens. Justement, il y a une enseignante en activité physique adaptée qui vient et qui leur fait du sport adapté, différent de la réalité virtuelle, du coup. Et c'est hyper important, notamment pour les bénéfices psychologiques, mais aussi les bénéfices physiques, parce qu'on a vu que l'activité physique adaptée, ça a été démontré que ça va aider à réduire la fatigue qui est liée au cancer, à ses traitements, ça va augmenter la qualité de vie de l'enfant, ça va permettre d'améliorer le taux de survie qui est associé au cancer.
Mais rien que le fait d'aller dans ce service-là, il y avait un petit peu d'appréhension au début. C'est assez stressant de voir, c'est quand même des situations compliquées, c'est des émotions très fortes qui sont ressenties notamment par les parents et les familles de l'enfant. La première fois que j'étais en contact avec les enfants, j'étais accompagné, j'allais pas tout seul voir les enfants, parce que c'est des enfants qui peuvent être surpris de voir un inconnu débarquer dans leur chambre, c'est assez normal. Il y a toujours un petit peu cette appréhension au début du projet d'aller voir des enfants, leur expliquer : “ça te dit de jouer à la réalité virtuelle”, donc c'est quelque chose d'assez nouveau, c'est les écrans, donc il y a les parents qui sont à côté. Et puis chaque enfant est différent, sans même parler de la maladie, un enfant peut ne pas être motivé du tout par ça. Là, il n'y a qu'un jeu qui est proposé aux enfants, c’est pour ça qu'il faut essayer de diversifier au maximum ce qui va leur être proposé.
J'étais vraiment surpris parce que je n'ai pas souvent affaire aux enfants à cette période de ma vie, je suis un peu entre les deux, si je donne des cours de maths de soutien, donc il y a un peu ce contact-là avec les enfants. Mais là, c'est quelque chose de différent qu'on leur apporte. Forcément, ils ont l'air plus contents de me voir arriver avec un casque de réalité virtuelle qu'ils ne voient le soignant arriver avec des médicaments à prendre. Là-dessus, ce n'était pas hyper compliqué parce qu'ils étaient tous hyper intéressés et puis ils sont tous hyper à l'écoute de leurs sensations. Le but ce n'est pas de leur faire pratiquer s'ils ne vont pas bien, s'ils ont des risques de nausées. En fait, là-dessus, j'ai été choqué de voir que des enfants de 6-7 ans étaient hyper alertes avec eux-mêmes et hyper matures là-dessus. Je pense qu'ils apprennent justement quand ils ont des formes aussi variables à pouvoir s'écouter eux-mêmes et à dire non quand ils ne sont pas capables de jouer. Non, en vrai, ça s'est super bien passé. Ils écoutaient bien. Des fois, ils étaient un peu surexcités quand ils jouaient au jeu, mais non, ça s'est bien passé.
Forcément, ça touche et c'est triste, mais je me dis qu'il faut essayer de penser à ce qu'on peut leur apporter une petite pièce avec le projet. On essaie de leur apporter un petit peu une distraction et des bénéfices de santé aussi derrière. Il faut essayer de faire la part des choses et savoir qu'on reste dans un milieu hospitalier où il peut se passer ça. Il y a des décès. L'important, c'est de pouvoir essayer de leur apporter au maximum. Mais oui, à titre personnel, je pense qu'avec ces trois mois, ça m'a aidé. Au début, ça a été peut-être un peu compliqué, mais là, je vais continuer en thèse. Ça va être plus facile de réaliser cette série de tests maintenant que je ne suis plus habitué. L'objectif à terme, ce serait hyper satisfaisant et hyper gratifiant si ce serait un projet qui serait réellement mis en place dans les hôpitaux avec la possibilité, pour l'enfant, de jouer de manière autonome. Le but, c'est de pouvoir vraiment motiver l'enfant à se dépenser au maximum, même si les conditions ne sont pas réunies pour. Ce serait une grande fierté là-dessus aussi. Après, avoir le retour du plaisir de l'enfant, c'est hyper intéressant aussi. Le but de ce projet-là, c'est de faire plaisir à l'enfant tout en lui permettant de se dépenser. Si on arrive à pouvoir mettre ça en place de manière autonome à l'hôpital, ce serait un objectif qui serait rempli.
[Musique du générique]
Voix off : Plus qu'une fac, c'est un podcast de l'Université Rennes 2 réalisé par le service communication.
Merci à Jos que vous retrouverez dans le prochain épisode alors qu'il est sur le point de se lancer dans le grand bain du doctorat.
Lien de l’épisode : https://www.podcastics.com/podcast/episode/jos-12-346832/