Les chercheuses et chercheurs mènent des campagnes sur le terrain, comme au marais de Sougéal, où ils comparent la qualité des capteurs et étayent la précision technique de leurs outils par des mesures au sol. Les images produites ainsi servent dans le cadre de recherches environnementales : par exemple, pour étudier les risques de gel dans les vignobles ou pour analyser l’adaptation des forêts au changement climatique.
La plateforme se situe à l’interface entre observation au sol et observation satellitaire, offrant des données fréquentes et très détaillées pour mieux comprendre l’évolution des écosystèmes et des environnements.
Ces travaux sont menés en partenariat avec le Service national d'observation (SNO) OBSERVIL ainsi que dans le cadre d’activités de caractérisation et de suivi des paysages et de changements environnementaux de l’Observatoire des Sciences de l’Univers de Rennes (OSEREN).
Je suis Thomas Houet, directeur de recherche au CNRS et responsable de la plateforme D2T, qui signifie drone terrain télédétection.
La plateforme D2T existe depuis 2019. C’est une plateforme du CNRS hébergée par l’université de Rennes 2 et qui vise à acquérir des images drone pour le suivi de l’écologie et de l’environnement. Aujourd’hui, cette plateforme est constituée de trois télépilotes, d’une certaine quantité de drones — on en a à peu près six ou sept — et d’une multitude de capteurs.
Pour réaliser toutes les acquisitions, on utilise différents types de drones. Certains sont adaptés aux milieux forestiers, comme les drones multicoptères. D’autres sont plutôt adaptés à la cartographie de très grandes surfaces, ce qu’on appelle des ailes rigides. La plateforme D2T a la chance et l’originalité de disposer de drones qui combinent les deux avantages : un décollage vertical et une structure en aile rigide permettant de cartographier de très grandes superficies.
Récemment, nous sommes allés sur le marais de Sougéal, une zone étudiée dans le cadre de la zone atelier armorique, afin d’évaluer et comparer la qualité des données produites par les capteurs que nous installons sur nos drones. Avec des collègues, nous avons placé des cibles au sol pour surveiller une zone en particulier, que nous avons survolée plusieurs fois avec les mêmes capteurs pour pouvoir comparer les données obtenues quasi simultanément.
Pour valider ces données, nous avons réalisé des mesures au sol avec d’autres instruments, par exemple des capteurs de température ou d’humidité du sol, afin de vérifier que ce que détectent nos drones correspond bien à la réalité du terrain.
En tant que géographe et responsable de cette plateforme, mon objectif est de produire des images utiles à d’autres scientifiques. Par exemple, nous avons travaillé avec un climatologue qui cherchait à comprendre la répartition des températures dans un territoire viticole pour mieux appréhender le risque gélif, c’est-à-dire le risque de gel des grains de raisin. Nous sommes allés sur le terrain avec lui : il m’a exposé sa problématique, j’ai défini le protocole pour acquérir des données au bon moment de la journée et avec les bons capteurs. Le résultat a été la détection de « lacs d’air froid », des zones d’accumulation d’air froid où le gel est susceptible de se produire, ce qui permet une meilleure caractérisation du territoire viticole.
Autre exemple : nous travaillons aujourd’hui avec des collègues de Lyon en écologie forestière pour mieux comprendre l’adaptation des forêts au changement climatique. Nous utilisons notamment un site d’expérimentation dans la forêt de Rennes. L’objectif est de cartographier le comportement des arbres lors de périodes de forte chaleur, d’observer le moment où les feuilles sortent au printemps, et de relier ces informations aux paramètres de stress de la végétation, à l’évolution de la croissance de l’arbre et au nombre de glands produits chaque année.
L’objectif général de la plateforme D2T est de produire des données permettant de mieux comprendre l’évolution de notre environnement et de l’écologie actuelle. Nous travaillons avec des images extrêmement précises, que les drones permettent d’acquérir beaucoup plus fréquemment que les satellites. Nous nous situons dans une zone de complémentarité entre la recherche au sol et l’observation satellitaire, à l’interface entre le travail des scientifiques de terrain et les données fournies par les satellites.