Date de publication
26 avril 2024
modifié le

“Avec les arts, tout est possible, mais avec la marionnette, encore plus”

Dans le cadre de son projet de cours annuel, l’équipe étudiante du master 2 MAGEMI (Gestion et mise en valeur des œuvres d'art, des objets ethnographiques et techniques) se penche sur la marionnette, un art total et méconnu, dans DESARTICULÉE, une exposition à l’Opéra de Rennes visible à partir du 3 mai 2024.

affiche de l'exposition DEsarticulée sur la marionnette

Pour commencer, pouvez-vous nous décrire votre promotion ?

Laurène Amet, Sarah Lemercier et Alice Potier pour l’équipe du M2 MAGEMI : Nous sommes 13 dans notre promotion, venant de licences variées : histoire, histoire de l’art, droit, arts plastiques, humanités… Nous souhaitons travailler dans la muséographie, la régie de collections, la programmation culturelle, la médiation culturelle, la communication, les métiers de la conservation, etc. C’est assez large donc ! Par exemple, pour nos stages de fin d’année qui valident notre formation, Alice sera assistante muséographique au Musée dauphinois de Grenoble ; Laurène, à Grenoble également, en service civique à la programmation culturelle dans l’association d’art contemporain Vi.vid ; et Sarah travaillera à l’écomusée de la Bintinais en tant qu’assistante en production et conception de la future exposition temporaire, dont la thématique portera sur les fleurs. 

La cohésion du groupe, c’est important pour nous, on n’est pas juste des camarades de classe, on s’organise régulièrement des événements pour passer du temps ensemble en dehors des cours. 

L’équipe MAGEMI organise tous les ans une exposition dans le cadre d’un projet collectif de cours. Parlez-nous du thème de cette année : la marionnette. 

Florence Duchemin-Pelletier, la responsable du master, nous a donné le thème en début d’année. La marionnette a été choisie car nous avons l’opportunité d’exposer à l’Opéra de Rennes, en lien avec le spectacle Les Ailes du désir, joué mi-mai. Dès le mois de septembre 2023, nous avons entamé une importante phase de recherche sur l’histoire de la marionnette, le métier de marionnettiste, etc. pour définir quels aspects nous voulions aborder dans l’exposition. Nous nous sommes concentré·es sur la marionnette contemporaine, puis finalement le lien entre la marionnette et l’artiste. Le titre que nous avons choisi, DESARTICULÉE. La marionnette & l’artiste, renvoie à ce lien que l’on cherche à déconstruire pour mieux le comprendre. On a aussi voulu placer la marionnette en premier, faire vraiment le focus sur elle, de sa création jusqu’à après le spectacle : d’abord les matériaux qui la composent, son histoire ; ensuite le jeu sur scène, comment son corps et celui de l’artiste jouent ; et enfin, ce qu’elle devient après la scène, est-elle rangée ? À quoi sert-elle, à transmettre ? À inspirer un autre spectacle ?

L'équipe du M2 MAGEMI pose dans les escaliers de l'opéra de Rennes
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L'équipe du M2 MAGEMI à l'Opéra de Rennes. 

Avez-vous travaillé avec des marionnettistes ?

Oui bien sûr, nous avons commencé par recenser et rencontrer des compagnies de théâtre de marionnette en Bretagne. Lors de nos échanges, nous avons ressenti que pour ces artistes, les marionnettes sont plus que de simples objets. Ils y sont attaché·es, parfois même les sacralisent au point de ne pas laisser d’autres personnes les toucher. C’est un lien presque spirituel. Nous avons décidé de construire l’exposition avec trois compagnies, différentes sur le plan esthétique et dans leurs relations à leurs marionnettes : Drolatic Industry, Scopitone & Cie et La poupée qui brûle. Grâce à elles, nous allons pouvoir montrer dans l’exposition une diversité de marionnettes, et de sujets aussi. Car toutes les trois ont pour point commun de rendre compte de sujets de société, graves et actuels. L’art de la marionnette, ce n’est pas que pour les enfants ; ce ne sont pas seulement des spectacles comiques de castelets dans les jardins parisiens, comme les clichés que nous pouvions nous-mêmes avoir au départ. Au contraire, il s’agit souvent d’aborder des sujets profonds. 

Comment est construite l’exposition ?

Elle est organisée autour de trois portraits de marionnettes stars, sélectionnées dans un spectacle de chaque compagnie. Dans chaque portrait, on retrouve des approches transversales avec des clés générales sur cet art, un témoignage filmé de marionnettiste, ainsi qu’une médiation. Par exemple, le public va pouvoir suivre le tuto d’un artiste pour reproduire les gestes et manipuler une marionnette qui sera mise à disposition. On ne voulait surtout pas mettre les marionnettes derrière des vitrines, ça nous semblait totalement contradictoire avec la nature même de cet art, qui relève du spectacle vivant. 

L’exposition s’accompagne d’un catalogue qui regroupe les témoignages retranscrits des marionnettistes, et des articles que nous avons écrits pour enrichir le sujet : sur la robotique, la place des femmes dans le domaine de la marionnette, la précarité du métier, etc.   
 

Des marionnettes de singe lors d'un spectacle
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Extrait d'un spectacle de Drolatic Industry. 

On peut suivre sur votre carnet de bord les coulisses de votre travail sur l’exposition. En quoi a-t-il consisté concrètement ?

Au début de l’année, pendant la phase de recherche, nous avons rencontré le comité scientifique de l’exposition, composé de Raphaèle Fleury, historienne de la marionnette et librettiste, et d'Aurélie Mouton-Rezzouk, maîtresse de conférences en études théâtrales à l’Université Sorbonne Nouvelle.

Nous nous sommes ensuite divisé·es en pôles de travail autour des principales missions de construction de l’exposition : la scénographie, le graphisme, la communication, l’association cARTel qui sert aux recherches de subventions finançant l’exposition, la médiation, la programmation culturelle, l’iconographie, la régie, et la réalisation des films témoignages des marionnettistes (évoqués plus haut). Chaque étudiant·e est membre de plusieurs pôles, et toutes les semaines, nous avons une réunion de suivi pour communiquer au reste de l’équipe les avancées de chaque pôle. 

Des professionnel·les interviennent durant nos cours, des directrices et directeurs de musée, des spécialistes de la médiation, de la programmation, etc. Nous avons aussi eu la chance de faire des ateliers dans des musées comme au musée de Bretagne sur l’accessibilité par exemple. Nous sommes allé·es ensemble visiter le MAM, musée des arts de la marionnette à Lyon, voir tout le travail sur la manière de conserver le pouvoir d'attraction des marionnettes, de faire interagir le public. Nous avons également participé à un hackathon encadré par l’Edulab de Rennes 2 pour construire une partie du mobilier de l’exposition, dans une logique d’éco-conception en recyclant des matériaux. Bref, c’est grâce à toute cette effervescence, toutes ces actrices et acteurs impliqué·es que l’exposition est possible. C’est passionnant car on touche à de nombreuses missions, et c’est vraiment l’objectif du master : nous donner les clés principales de ces métiers pour évoluer. 

Comment avez-vous travaillé avec l’Opéra de Rennes ?

Marion Etienne, responsable du pôle publics et action culturelle, est notre interlocutrice principale à l'Opéra de Rennes. Nous avons eu une réunion de travail en janvier 2024 avec elle ainsi que le directeur de l’opéra et l’équipe technique, puisqu’ils nous aident sur une partie de la construction de l’exposition, pour un des mobiliers phares. C’est essentiel de collaborer avec elles et eux, car on doit s’adapter à un lieu qu’on ne connaît pas, en exploitant au mieux ses possibilités. C’est une chance, en tout cas, d’exposer dans ce lieu très important à Rennes, et de participer à l'ouverture de cette institution culturelle qui peut impressionner… On a vraiment travaillé sur l’accessibilité de l’exposition, la lisibilité, et une posture qui ne soit pas élitiste mais proche de tout type de public. 

Qu’aimeriez-vous que se disent les personnes après avoir visité votre exposition ?

“Je ne savais pas que la marionnette pouvait ressembler à ça !” Notre but est vraiment d’ouvrir les horizons sur la marionnette, que l’on qualifie d’art total parce que cela mélange les arts plastiques, la musique, la danse, la dramaturgie, la mise en scène, etc. Avec les arts, tout est possible, mais avec la marionnette, encore plus. Grâce à elle, on peut dire des choses que l’on n’oserait pas dire autrement sur scène, lui faire porter un message, et cela a un vrai effet cathartique. 

Du 3 mai au 29 juin 2024 : exposition "DESARTICULÉE La marionnette & son artiste"
L'exposition s'enrichit d'une programmation culturelle : L'opéra Les Ailes du désir, des visites guidées, une journée de la marionnette (vendredi 3 mai au Jeu de Paume) et une projection du film Interdit aux chiens et aux Italiens au cinéma Arvor le mardi 7 mai sont au programme.
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