Date de publication
20 janvier 2023
modifié le

Camille Collet, figure du socio-sport rennais

Rennes 2 part à la rencontre de ses ancien·ne·s étudiant·e·s. Après un parcours en STAPS qui l’a menée jusqu’à la thèse, Camille Collet, 32 ans, est aujourd’hui responsable d’un service dédié au socio-sport au sein de l’association rennaise le Cercle Paul Bert.

Quand êtes-vous entrée à Rennes 2 et pour y suivre quelles études ?

J’y suis arrivée en 2008 pour intégrer un DEUST Animation et gestion des activités physiques et sportives (AGAPS) en milieu urbain [formation qui n’est plus dispensée à Rennes 2 aujourd’hui] pour être animatrice sportive. J’ai fait le choix de poursuivre mes études en licence 3 Management du sport, événementiel et tourisme sportif, puis en master dans la même filière. Ensuite, dans la perspective de faire une thèse, j’ai repris un master 2 aujourd’hui appelé Développement Intégration Sport et Culture (DISC). En parallèle, j’ai effectué un stage dans le laboratoire de recherche VIP2, sur une recherche-action autour de l'insertion par le sport dans le 19e arrondissement de Paris. Il a fallu ensuite un an et demi pour réunir les financements pour ma thèse CIFRE, période durant laquelle j’ai effectué un service civique puis un CDD en tant qu’animatrice socio-sportive au Cercle Paul Bert Villejean, ce qui m’a permis de prendre de l’avance sur ma recherche. Puis j’ai commencé mon doctorat en 2015 et trois ans plus tard, j’ai soutenu ma thèse portant sur le socio-sport sur le territoire rennais.

Au départ, je voulais faire des études courtes [rires] ! Prise dans les études et par intérêt pour le sujet je suis allée jusqu’à la thèse, comme quoi rien n’est écrit d’avance.

Qu’est-ce que le socio-sport ?

C’est le fait d’utiliser le sport comme un outil social pour permettre à des publics éloignés de la pratique sportive d’y accéder. Contrairement à la pratique sportive compétitive traditionnelle, où on vise la performance ou des objectifs techniques, là les buts sont sociaux comme l’amélioration du bien-être physique et mental de la personne, la création de liens sociaux, etc. On est sur une pratique plus informelle, et plus en proximité.

Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire ces études ?

J’ai toujours aimé le sport. Mon père faisait du football et déjà toute petite je le suivais le dimanche sur le terrain. J’ai moi-même fait beaucoup de foot, en compétition puis en loisir, et j’ai un attrait de manière générale pour les sports collectifs. Concernant ma sensibilité pour le social, je pense qu’elle vient aussi de ma famille puisque mes parents sont tous les deux d’anciens travailleurs sociaux, l’une de mes sœurs est éducatrice spécialisée et l’autre travaille dans le médico-social… Le socio-sport regroupe les deux donc je m’y épanouis pleinement.

Image
Camille Collet sur le campus Villejean
Légende

Camille Collet sur le campus Villejean, devant la nouvelle aire de fitness. 

Qu’avez-vous préféré dans votre formation à Rennes 2 ?

La diversité des contenus proposés. Toutes mes formations mélangeaient différents domaines et compétences, et regroupaient un panel d’intervenant·e·s, à la fois des enseignant·e·s-chercheur·se·s de différentes disciplines (socio, psycho, histoire, etc.), et des professionnel·le·s qui apportaient leur regard de terrain. Je reste sensible à ce mélange dans mon travail ; je pense que l’apport scientifique est essentiel pour comprendre et prendre de la hauteur, et j’aime aussi l’aspect concret du terrain et du travail d’équipe. Par exemple, en master Management du sport, nous avions travaillé avec les étudiant·e·s du master DISC sur une journée événementielle pour des publics en situation de handicap ; nous apportions nos compétences en méthodologie de travail et eux et elles leurs savoirs sur l’inclusion dans le sport, et les échanges étaient super intéressants.

J’ai aussi fait des rencontres, que ce soit de pair·e·s ou d’intervenant·e·s. J’ai gardé contact avec des amies que je vois régulièrement même si nous vivons un peu partout en France, ou avec Gaëlle Sempé, ma directrice de thèse dont j’adorais le cours de sociologie, plein d’anecdotes et très vivant.

Qu’avez-vous fait après votre diplôme ?

La thèse CIFRE m’a permis d’intégrer, en tant que coordinatrice animatrice, le Cercle Paul Bert, une association sportive et culturelle rennaise qui est le 2e club omnisports le plus important en France. Quand je suis arrivée, il y avait des activités socio-sportives dans quelques quartiers prioritaires, mais pas de service à proprement parler. Après les attentats du 13 novembre 2015, l’Etat a mis en place des financements pour développer les actions en faveur de la citoyenneté, ce qui a permis de créer le service de socio-sport, en lien avec mes travaux de recherche, et de multiplier et structurer ces actions. Nous étions trois salarié·e·s dans le service au départ et nous sommes aujourd’hui 10 ; et au fur et à mesure que les projets se sont développés et que l’équipe a grandi, j’ai progressivement fait moins de terrain pour devenir responsable du service. J’occupe ce poste depuis 1 an et demi. Plusieurs personnes dans l’équipe ont fait le master DISC : elles ont développé une sensibilité à ces questions-là à travers leur cursus universitaire et ont une approche et une vision autre du sport traditionnel de compétition. Nous travaillons autour de deux axes : les publics des quartiers prioritaires dans la tranche d’âge 10-17 ans, et les publics qui connaissent d’autres freins spécifiques (personnes privées de liberté ou en situation de handicap moteur ou psychique, gens du voyage, demandeur·se·s d’asile, etc.).

Quelles sont vos fonctions en tant que responsable du service de socio-sport au CPB ?

La gestion du service d’une part : l’accompagnement des salarié·e·s, la stratégie du projet de service, la gestion du budget et la recherche de financements (réponses à des appels à projets par exemple). D’autre part, au-delà des activités sportives quotidiennes, nous avons développé un important aspect événementiel. On organise des activités de proximité dites “bas de tours” pour éliminer un maximum de freins à faire du sport comme l’éloignement des équipements sportifs, le coût, le genre, etc. Par exemple, l’été nous proposons à Villejean l’événement “Berry Plage” où l’on installe du sable dans le complexe sportif du Berry avec l’aide de la ville de Rennes, et tous les jours ont lieu des animations sportives et culturelles gratuites et ouvertes à tou·te·s. On fait aussi des actions autour de la promotion du sport, comme “Macadam Handball”, pour valoriser la pratique sportive de haut niveau et amatrice à Rennes, et des animations interquartiers pour casser les représentations et les barrières qu’il peut y avoir entre les jeunes des différents quartiers rennais. On utilise notamment le support du football, un sport très populaire dont on sait grâce à des études qu’il s’agit d’une très bonne porte d’entrée dans les quartiers prioritaires. On organise par exemple un tournoi de futsal citoyen : chaque équipe joue des matchs mais participe aussi à des ateliers débats de sensibilisation à certaines thématiques, comme la violence dans les jeux vidéo, les réseaux sociaux, etc. Ce n’est donc pas forcément celle qui gagne les matchs qui remporte le tournoi, mais celle qui a aussi été dans un échange constructif avec les autres et a réussi à jouer dans un bon état d’esprit.

Quel lien faites-vous entre votre formation et votre métier actuel ?

Avec le recul, je réalise que mon poste actuel est vraiment la continuité des trois filières dans lesquelles j’ai étudié. Grâce au DEUST qui est une formation professionnalisante, j’ai commencé tôt à faire du terrain, et j’ai ce regard qui pour moi est essentiel pour comprendre la réalité du travail de mes collègues. La formation en management m’a apporté des compétences en méthodologie de projet et en gestion de service que j’utilise quotidiennement, et le master DISC une très bonne connaissance du socio-sport et du réseau socio-sportif sur le territoire rennais. Pour ma recherche, j’ai fait une centaine d’entretiens et des observations auprès de nombreuses associations, ce qui m’a vraiment été utile pour construire mon réseau et mener aujourd’hui un travail partenarial.

Que conseilleriez-vous aux étudiant·e·s qui envisagent de suivre la même formation que vous ?

Je leur conseillerais d’être ouvert·e à toutes les possibilités que peuvent offrir les formations STAPS qui sont larges et transversales, de ne pas s’arrêter à des idées préconçues et de saisir les opportunités. Aussi, s’investir dans le stage est primordial ; la preuve pour moi, j’ai réussi à créer mon poste dans la structure dans laquelle j'ai fait mon stage. Enfin, si je peux encourager les filles et les femmes à intégrer les filières sportives, ça me tient à cœur parce qu’elles sont sous-représentées alors qu’elles sont tout autant légitimes et capables que les hommes. Donc n’hésitez pas, vous avez votre place !

Dans la même série

9 articles